Image 1 : Un site de restauration en Mayenne (© Steve Aubry)
Dans un précédent article, nous vous présentions ce que sont les Sites Naturels de Compensation (SNC), leurs intérêts en matière d’anticipation et de mutualisation de la compensation écologique, et la procédure à adopter en vue d’obtenir l’agrément nécessaire à leur mise en service.
Aujourd’hui, nous vous proposons un zoom sur le Guide d’aide à l’élaboration d’un Site Naturel de Compensation [1] publié par le Commissariat Général du Développement Durable (CGDD) en février 2023. Ce guide a vocation à appuyer les acteurs – publics ou privés – désireux de développer un SNC, à présenter des éléments de méthode et des références utiles pour la constitution du dossier de demande d’agrément.
Image 2 : Le guide pour l’élaboration d’un Site
Naturel de Compensation (© CGDD)
Retour sur les principaux enjeux abordés :
Où créer un Site Naturel de Compensation et en réponse à quel besoin ?
La vocation d’un SNC est de générer des gains écologiques en réponse à des besoins de compensation anticipés sur un territoire donné. Un projet de Site Naturel de Compensation doit ainsi cibler :
- Un territoire sur lequel des projets d’aménagement sont susceptibles de voir le jour et de faire appel à l’offre de compensation proposée par le SNC (dans le respect du principe d’équivalence écologique* et de proximité fonctionnelle**). Ce potentiel peut se démontrer en s’appuyant sur :
- La connaissance du territoire, des composantes de biodiversité qui s’y trouvent et qui sont susceptibles d’être impactées ;
- Le type de compensation écologique usuellement réalisé sur le territoire et les manques constatés ;
- L’historique des projets réalisés (localisation, type d’impact) ;
- De la prospection concernant les projets à venir auprès d’acteurs locaux ;
- Des projections sur la base de documents de planification territoriale (PLUi, SDAGE, SCoT SRADDET)
- Un terrain sur lequel une plus-value écologique peut être réalisée grâce à la mise en œuvre d’opérations de génie écologique. La pertinence de ce(s) terrain(s) sera variable en fonction :
- Des opportunités en matière de disponibilité foncière sur le territoire ;
- Des caractéristiques du foncier et de son potentiel de gains écologiques (fonction de état de dégradation, de sa dynamique écologique, de sa surface, de son intégration dans la trame paysagère, etc.) ;
- De la compatibilité entre son potentiel de gains écologiques et le besoin de compensation identifié auquel on cherchera à répondre.
* Principe qui suppose que les gains écologiques générés par les mesures de compensation doivent être écologiquement au moins équivalents aux pertes de biodiversité qu’ils compensent.
** Principe qui suppose la mise en œuvre des mesures de compensation en priorité au plus près de(s) site(s) endommagé(s), et dans tous les cas à proximité fonctionnelle de la zone affectée par le projet, sur le(s) site(s) le(s) plus approprié(s) au regard des enjeux en présence et au sein de la même zone naturelle.
Note :
|
À ce stade, le besoin de compensation écologique à venir a été identifié et du foncier est pressenti pour y apporter une réponse. Il convient ensuite de préciser le potentiel de gain écologique du site, les opérations de gains écologiques à effectuer puis de traduire la plus-value écologique générée sous la forme d’UC.
Comment créer l’offre de compensation ?
L’état initial
Afin de justifier de gains écologiques et vendre des UC, il est nécessaire de pouvoir mesurer la plus-value écologique effectivement générée. Pour cela, la réalisation d’un état initial est indispensable. Le protocole utilisé doit être reproductible, robuste, opérationnel, transparent et financièrement soutenable. L’état initial permet l’établissement de l’état de référence qui fera l’objet de futurs suivis et de l’évaluation comparative des pertes et des gains écologiques générés entre le SNC et les futurs sites impactés.
Les composantes de biodiversité à inclure dans l’état initial concernent aussi bien les habitats, les espèces que les fonctions écologiques. On insistera particulièrement sur les composantes de biodiversité cibles du Site Naturel de Compensation et incluses dans son offre de compensation. L’état initial permet notamment de mieux cerner :
- La trajectoire écologique du site ;
- Les éventuelles causes de dégradation et leur caractère levable ou non ;
- Les leviers d’action du porteur de SNC pour améliorer la qualité écologique du site ;
- Le potentiel ou l’absence de potentiel de gains écologiques au regard du besoin de compensation identifié.
Contenu de l’offre de compensation
Lorsque le potentiel de gains écologiques du site est avéré, il convient de :
- définir les composantes de biodiversité qui figureront dans l’offre de compensation du SNC (habitat, espèces, fonctions cibles)
- définir des objectifs opérationnels de mise en œuvre (ex : création d’une mare) ou de résultat (ex : colonisation de la mare par des amphibiens) permettant d’évaluer la réussite du SNC. Pour cela, on pourra relier chaque objectif à :
- Un ou plusieurs indicateurs de suivi
- Un résultat escompté
- Une échéance d’atteinte de résultat
- Un calendrier de mise en œuvre et de suivi
Il s’agira pour l’opérateur SNC de suivre et démontrer tout au long de la vie de son projet l’atteinte de ses objectifs, de justifier du gain écologique obtenu et vendu sous la forme d’UC et, le cas échéant, de mettre en œuvre les mesures correctrices qui s’imposent.
Comment définir et vendre des unités de compensation ?
Définition d’une unité de compensation
Le gain écologique généré sur le Site Naturel de Compensation correspond à la différence entre l’état initial et l’état final visé du site. Les éléments de biodiversité qui le composent doivent être suffisamment explicités pour décrire précisément le contour d’une UC***. Ce gain peut être considéré homogène sur la totalité de la surface du SNC ou hétérogène. Dans ce dernier cas, il peut exister autant de type d’UC que de types de zones cohérentes au sein du SNC.
*** Une Unité de Compensation (UC) correspond à une prestation de génie écologique délimitée dans le temps (30 ans au minimum) et dans l’espace (ex : 1 UC = 1 ha non localisé). Par exemple, 1 UC peut correspondre à 1 ha d’habitat H restauré et suivi pendant 30 ans, bénéficiant au cortège d’espèces C et rétablissant les fonctions écologiques F.
Note :
À titre d’exemple, le SNC de Cossure présente un gain écologique jugé homogène sur l’ensemble de ses 357 ha. 1 UC correspond à la restauration et au suivi pendant 30 ans d’1 ha de pelouse sèche rase bénéficiant à un cortège d’espèces de la plaine de la Crau. |
Prix d’une unité de compensation
Le prix attribué à une UC intègre l’ensemble des dépenses nécessaires à sa création. Celles-ci sont liées :
- à la sécurisation du foncier ;
- aux actions de génie écologique mises en œuvre ;
- aux suivis écologiques ;
- aux actions d’entretien et de mise en œuvre d’éventuelles actions correctrices sur la durée de l’engagement ;
- aux frais de transaction ;
- au reporting auprès des services instructeurs ;
- aux frais d’assurance ;
Ce prix est ainsi variable en fonction du type de composantes de biodiversité ciblé, de la nature des opérations de restauration réalisées (légères ou lourdes), de la stratégie de sécurisation du foncier (acquisition ou conventionnement), de la nature et de la fréquence d’entretien, etc.
Note :
En achetant une UC, un aménageur ne se rend pas propriétaire d’éléments de biodiversité présents sur le SNC. Il rémunère une prestation de génie écologique (additionnelle, efficace et pérenne) et s’acquitte de son obligation réglementaire à compenser ses impacts. Il reste toutefois responsable auprès des services de l’Etat de l’efficacité des mesures de compensation. |
Comment assurer la sécurisation financière d’un SNC ?
Pendant la durée de l’agrément
L’agrément SNC est délivré pour une période minimale de 30 ans. Durant cette période, le porteur de SNC doit attester de la maitrise du foncier (sur le plan juridique et financier) sur lequel sont réalisées les mesures compensatoires.
Plusieurs outils sont pour cela disponibles tels que :
- L’acquisition foncière
- Le bail emphytéotique
- L’Obligation Réelle Environnementale (ORE)
- La fiducie environnementale
Le coût et le niveau de maitrise foncière qu’ils octroient reste cependant variable selon les contrats.
Dervenn peut vous accompagner dans la réalisation d’une Obligation Réelle Environnementale.
En tant qu’entreprise à mission au service des territoires et de la biodiversité, Dervenn peut s’inscrire en tant que tiers garant et suivre et contrôler le respect du contrat d’ORE. |
Au-delà de l’agrément
Au-delà de la période d’agrément et toujours dans une optique de pérennisation du gain écologique, le porteur de SNC peut décider de conserver la maitrise foncière du site. Il a aussi la possibilité d’inscrire son projet dans le cadre de mesures de protections réglementaires (mise en réserve, arrêté préfectoral de protection, ENS, etc.) ou de le transférer à un organisme de protection de la nature (type CEN).
Vers une évolution des Sites Naturels de Compensation (SNC) en Sites Naturels de Restauration et de Renaturation (SNRR)
Contexte
Depuis 2016 et le lancement des SNC, seul un site a pu obtenir l’agrément de la part des services de l’Etat (le SNC Cossure porté par CDC Biodiversité). Les candidats à l’agrément rencontrent des difficultés pour répondre aux exigences de l’agrément et pointent les incertitudes économiques qui entourent le dispositif [2].
Pour pallier les difficultés liées à la constitution du dossier de demande d’agrément, un important travail d’explicitation des attentes a été réalisé par le Ministère de la Transition Ecologique (MTE) et ses partenaires via notamment la publication du Guide SNC [1] et du Guide de l’Approche standardisée pour le dimensionnement de la compensation [3]. Concernant les incertitudes économiques, le projet de loi « Industrie Verte » à paraître à l’automne pourrait rebattre les cartes.
Évolution
La loi Industrie verte a vocation à favoriser la réindustrialisation de la France en fournissant aux porteurs de projets industriels des sites « clefs en mains », incluant la compensation environnementale.
L’article 7 de cette nouvelle loi propose notamment une évolution des SNC en SNRR pour « Sites Naturels de Restauration et de Renaturation ». Cette évolution ouvrirait de nouvelles perspectives de développement de l’actuel dispositif en atténuant les incertitudes financières rencontrées par les SNC. Les nouveaux SNRR pourraient ainsi, en plus de la compensation écologique, répondre aux besoins de projets en matière de :
– compensation « ZAN » (Zéro Artificialisation Nette)
– restauration sur la base d’engagements volontaires
Par ailleurs, les SNRR pourraient répondre directement aux besoins d’un aménageur unique qui souhaite anticiper sa compensation et non plus nécessairement à des besoins mutualisés comme c’est le cas aujourd’hui. Nous en saurons plus lors de la parution du texte définitif (attendu d’ici la fin du mois d’octobre).
Plus d’informations à venir dans de prochains articles !
Conclusion
Les SNRR ont vocation à faire émerger une offre d’écosystèmes restaurés et à encourager les acteurs économiques, à l’instar des collectivités territoriales qui mènent déjà de telles opérations, à investir dans la restauration d’espaces naturels.Ce nouveau dispositif devrait offrir plus de visibilité aux porteurs de SNRR en permettant une diversification des sources de financement des projets.
Par ailleurs, l’évolution du dispositif SNC ne devrait pas modifier les exigences écologiques en matière de compensation. Les différents guides méthodologiques publiés par le CGDD [1, 3] sont donc toujours d’actualité.
Vous souhaitez développer un Site Naturel de Restauration et de Renaturation (SNRR) ?
Vous disposez de foncier et/ou vous souhaitez anticiper des besoins de compensation écologique, de restauration ou de renaturation ? Dervenn vous accompagne dans le développement de votre SNRR !
Dervenn Compensation Ecologique (DCE) vous accompagne tout au long de votre projet de SNRR, depuis l’identification des besoins de compensation jusqu’à l’élaboration d’une offre écologiquement pertinente et adaptée aux enjeux de votre territoire. Pour développer votre projet et élaborer le dossier nécessaire à l’obtention de l’agrément, DCE s’entoure de :
Dervenn Conseils & Ingénierie pour la réalisation de diagnostics écologiques et d’inventaires naturalistes, la recherche de foncier, le dimensionnement des opérations de génie écologique et de suivi, etc ;
Dervenn Travaux & Aménagements pour la mise en œuvre des opérations de génie écologique et leur entretien sur le long terme ;
Ses nombreux partenaires pour la sécurisation du foncier sur le long terme ou la réalisation d’études complémentaires.
- Pour tout renseignement : s.aubry@dervenn.com
- Contact : contact@dervenn.com
Et pour en connaître davantage sur les services proposés par Dervenn Compensation Écologique, cliquez ici : https://www.dervenn.com/domaines/accompagnement-des-mesures-environnementales/
En savoir plus :
Références :
[1] CGDD 2023, Guide pour l’élaboration d’un Site Naturel de Compensation. Lien : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/guide_elaboration_site_naturel_de_compensation_fevrier2023.pdf
[2] LATUNE Julie, AUBRY Steve, « Dix ans après le lancement de l’expérimentation française de la compensation par l’offre, quel bilan en tirent les porteurs de projet ? », Sciences Eaux & Territoires, 2021/4 (N° 38), p. 16-31. DOI : 10.3917/set.038.0016. URL : https://www.cairn.info/revue-sciences-eaux-et-territoires-2021-4-page-16.htm
[3] CGDD 2021Guide de l’Approche standardisée du dimensionnement de la compensation écologique. Lien : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Approche_standardis%C3%A9e_dimensionnement_compensation_%C3%A9cologique.pdf
[4] Projet de loi relative à l’Industrie Verte :
Lien : https://www.vie-publique.fr/loi/289323-industrie-verte-decarbonation-projet-de-loi
Lien : https://www.legifrance.gouv.fr/dossierlegislatif/JORFDOLE000047551965/
N’hésitez pas à nous suivre sur nos réseaux sociaux pour connaître toutes nos actualités : Facebook, LinkedIn, Twitter et YouTube.