Face aux questionnements actuels qui nous poussent à revoir notre façon de concevoir et de penser l’aménagement (réchauffement climatique, érosion de la biodiversité, questionnement autour de la place des sols vivants et principe de ZAN, de la perméabilité des sols, …), le végétal a plus que jamais et sans aucun doute, un rôle prépondérant à jouer comme un des éléments de réponse pour trouver de nouvelles solutions de conception paysagère.
Le végétal, véritable « climatiseur »
De nombreuses études montrent que le végétal a un rôle particulier à jouer face au réchauffement climatique.
Bien entendu et en premier lieu, par le stockage du carbone, que le végétal permet au travers de la photosynthèse, diminuant ainsi l’effet de serre joué par le CO2.
Mais le végétal a de multiples autres rôles climatiques sur lesquels chercheurs, concepteurs paysagistes, collectivités et autres organismes se penchent de plus en plus.
Parmi ceux-ci, et le plus évident, est l’ombrage que les arbres procurent. Le couvert d’un arbre filtre en effet environ 75 à 80% des rayons solaires. [1] Aussi, une canopée suffisamment dense est garante d’une régulation importante de la température au sol en évitant au rayonnement solaire de parvenir jusqu’à lui. Cette ombre peut aussi être un atout de taille dans la régulation thermique des bâtiments.
Parmi les mécanismes permettant cette absorption du rayonnement solaire, notons que 30% de ce dernier est réfléchi par les feuilles, et 50% du rayonnement est directement absorbé par le végétal. Pour alors réguler sa température, le végétal puise de l’eau dans le sol qui est évaporée par ses feuilles. Ce phénomène, appelé évapotranspiration, permet de réguler la température de manière très puissante en refroidissant l’air environnant.
On estime que les arbres, selon les conditions, peuvent ainsi refroidir l’air ambiant de -2°C à -8°C, et qu’un chêne restitue environs 1000 litres d’eau par jour au travers de l’évapotranspiration. [1]
Le rôle de l’arbre face au rayonnement solaire et principe du refroidissement de l’air par évapotranspiration
Le végétal comme support de biodiversité
Penser le végétal, c’est aussi penser aux essences plantées et à la palette végétale. En effet, tous les végétaux ne se valent pas du point de vue des services écosystémiques qu’ils rendent, ou face aux différentes contraintes de leur lieu de plantation.
Par exemple, un chêne pédonculé local accueille plus de 400 espèces d’insectes, alors que le chêne rouge d’Amérique n’en accueille qu’une quinzaine. [2]
Le chêne pédonculé (Quercus robur) : un arbre indigène abritant une biodiversité remarquable – © Wikimedia Commons Thérèse Gaigé
Pour l’essentiel, il est généralement bénéfique de penser les plantations au travers :
• D’une palette végétale locale
Naturellement adaptées au climat, aux types de sol et à la faune, les plantes locales exigent généralement moins de soins et d’eau. Elles sont également source de pollen au bon moment pour les insectes, et de nourriture pour les petits mammifères et les oiseaux. Elles participent également à la bonne insertion paysagère des projets.
Il est bien évident que toute espèce exotique envahissante est à proscrire absolument. (voir notre article dédié ici : https://www.dervenn.com/les-especes-exotiques-invasives/)
• De typologies de plantations adaptées aux enjeux écologiques
Selon les corridors écologiques présents ou à créer, aux espèces présentes sur place ou aux abords du lieu de plantation, il convient en effet de choisir la typologie végétale la plus adaptée et qui permettra de rendre le plus de services écosystémiques (fourré, prairie de fauche, boisement de haut jet, arbre isolé, …).
• Du cadre de contrainte spatial, pédologique, climatique et de gestion sur le long terme
Il est enfin nécessaire d’adapter les végétaux choisis au regard du type de sol, de l’exposition, de leur capacité à être pérenne face au changement climatique, mais également vis-à-vis des contraintes spatiales et de gestion ultérieure (développement à terme, possibilité de passer des engins d’entretien, utilisation projetée de l’espace, …).
Le végétal pour améliorer notre cadre de vie et notre bien être
Rappelons brièvement ici que le contact de l’homme avec le végétal et la « nature » a des bienfaits considérables pour notre santé, notre assiduité, notre concentration, notre stress (voir notre article dédié ici : https://www.dervenn.com/pourquoi-le-paysage-et-la-nature-sont-essentiels-a-notre-sante-et-notre-bien-etre).
Le végétal pour repenser notre rapport au sol
Questionner la place du végétal permet plus généralement aux paysagistes et urbanistes de repenser notre rapport au sol vivant, préoccupation par ailleurs de plus en plus forte des pouvoirs publics (au travers de la ZAN notamment : voir notre article dédié ici : https://www.dervenn.com/quest-ce-que-la-zan/).
Laisser plus de place au végétal, c’est aussi travailler sur la mise en place de zones en terre, les interconnexions entre ces zones, et d’ainsi œuvrer en faveur de la trame brune.
Le sol est bien sûr à la base de nombreuses activités (agriculture, détente, loisirs, …). Mais il est également le support d’une biodiversité impressionnante, à la base de toute la chaîne alimentaire terrestre (1 gramme de sol d’une forêt tempéré abrite 4000 espèces de bactéries et 2000 champignons saprophytes)[3].
Nombre d’espèces dans le sol en forêt tempéré
Cette entrée dans le projet de paysage permet de requestionner certains grands principes dans la définition des types d’espaces, dès l’amont : quelle place dédier à la voiture ? Quelles emprises laisser aux bâtiments ? Aux zones minéralisées ? A celles de pleine terre ?
La réussite de cette réflexion s’accompagne cependant d’un regard attentif à porter également sur l’ensemble des aspects techniques relatifs aux plantations par un paysagiste concepteur / maître d’œuvre qualifié (bonne épaisseur de terre, fosses de plantations de bonne dimension, terre de qualité, soins à la plantations, …).
Cette question des sols recoupe aussi celle des matériaux de surface, qui doivent être pensés pour être de plus en plus perméables. Au-delà des possibilités offertes par ceux-ci pour permettre au végétal de s’exprimer (pavés en joints gazons, …), les matériaux perméables permettent en effet une meilleure gestion de l’eau et d’agir sur l’ilot de chaleur urbain, permettant par la même occasion de limiter les effets d’épisodes climatiques de plus en plus violents.
Désimperméabiliser pour replanter les espaces urbains © Wikimedia Commons STORM Outreach
Ce questionnement suscite également de plus en plus d’interrogations et engendre des projets de requalification dans des espaces déjà urbanisés.
Force est de constater que les aménagements passés ont en effet trop souvent relégués le rôle du végétal à celui de « décor », sans embrasser l’ensemble des bénéfices qu’il peut procurer.
Heureusement, de plus en plus d’initiatives émergent, visant à renaturer / désimperméabiliser des espaces pour permettre leur végétalisation (cours oasis, modification de la gestion des eaux pluviales au travers de noues, …).
Le végétal comme levier d’action pour des aménagements plus vertueux
Pour l’ensemble des raisons évoquées ici, et au travers de notre démarche d’éco paysage, notre paysagiste concepteur réfléchit dès les premières phases du projet à intégrer l’ensemble des thématiques inhérentes au végétal afin de penser l’aménagement différemment.
Nous sommes en effet convaincus que questionner la place des espaces végétalisés dans les aménagements paysagers est un des leviers majeurs pour répondre de manière positive aux enjeux de demain, qu’ils soient liés à la gestion de l’eau, à l’artificialisation des sols, au cadre de vie, à la biodiversité ou encore au changement climatique.
[1] « Le pouvoir des arbres : l’évapotranspiration », onf.fr
[2] https://www.notrenature.be/article/nos-chenes-indigenes-accueillent-plus-de-1000-especes
[3] d’après Torsvick et al. (1994), Hawksworth (2001), Schaefer et Schauermann (1990), https://www.supagro.fr/ress-pepites/OrganismesduSol/co/4_1c_OSdiversite.html
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