Qu’est-ce que la translocation végétale ?
La translocation végétale est « un transfert de plantes ou de matériel végétal régénératif provenant d’une collection ex situ ou d’une population naturelle, dans une nouvelle localisation (appelé site d’accueil), le plus souvent en milieu naturel » (Commander et al. 2018). Il est également possible d’effectuer des opérations de translocations animales comme le déplacement de reptiles, néanmoins nous ne traiterons que de la translocation d’espèces végétales dans cet article.
Il existe quatre grands types de translocation :
- Le renforcement de population ;
- La réintroduction ;
- La migration/colonisation assistée ;
- Le remplacement écologique.
Il faut distinguer la translocation conservatoire (ou volontaire) qui a pour objectif d’améliorer le statut de conservation de l’espèce/population ou de restaurer le fonctionnement de l’écosystème ; de la translocation réglementaire qui intervient dans le cadre d’un projet d’aménagement qui menacerait une population. Toutefois, la translocation effectuée dans un cadre réglementaire peut avoir une vocation conservatoire.
Réglementation espèces protégées et translocation végétale
En France, la législation nationale prévoit l’interdiction de destruction et du déplacement d’individus d’espèces protégées. Une liste nationale d’espèces végétales protégées prévoit les espèces visées par cette réglementation (Arrêté du 20 janvier 1982, modifié par l’arrêté du 31 août 1995)[1]. Des listes régionales et/ou locales peuvent également déterminer des niveaux d’enjeux.
Dans le cas d’un projet d’aménagement qui impacterait un individu ou une population d’individus d’espèces protégées, une demande de dérogation au titre des espèces protégées est obligatoire pour pouvoir déplacer ces individus soumis à un risque de destruction.
Initialement considérée comme une mesure de réduction, la translocation est davantage jugée comme une mesure d’accompagnement réalisée à titre expérimental depuis la révision du Code de l’environnement de 2016. En cause, le risque d’échec important et le manque de retours d’expérience à ce sujet ne permettent pas d’assurer la réussite de ce type d’opérations.
Les types de translocation végétale
Il existe différentes méthodes de translocation végétale, qui varient selon le type de plante et de son cycle de vie. Les plantes annuelles sont caractérisées par un cycle de vie d’une année qui va de la germination à la production de graines. Il s’agit donc en général d’un déplacement de la banque de graines contenue dans le sol ou d’un semi de graines prélevées au préalable sur les pieds impactés.
À l’inverse, les plantes vivaces sont capables de vivre plus de deux ans grâce à leurs organes spécialisés souterrains (racines, bulbes, rhizomes, …). La translocation consistera donc à prélever cet organe, via une motte ou plaque de terre que l’on replantera sur le site d’accueil.
Par ailleurs, certaines plantes dépendent fortement des mycorhizes pour leur croissance. C’est notamment le cas des orchidées sauvages pour lesquelles le déplacement de la plante est indissociable des mycorhizes qui vivent en symbiose avec, dans le substrat. Elles permettent à la plante d’absorber des nutriments essentiels comme l’azote ou le phosphore, mais améliore également la résistance au stress environnementaux, comme cela peut être le cas lors d’une opération de translocation.
Voici quelques exemples de typologie de translocation végétale :
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Figure 1 : Transfert de substrat vaseux contenant la Pilulaire – Pilularia globulifera. |
Figure 2 : Transfert par motte d’une espèce protégée, l’Asphodèle d’Arrondeau – Asphodelus macrocarpus subsp. Arrondeaui. |
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Figure 3 : Transfert d’espèces annuelles par décapage de la couche superficielle du sol. |
Figure 4 : Transfert d’espèce par semi. |
Les étapes de la translocation végétale
Etape 1 : État initial & diagnostic
La première étape consiste à s’assurer d’avoir les connaissances suffisantes sur la population végétale qui sera déplacée : espèce(s), caractéristiques écologiques, surface/nombre de pieds, état de la population…
Pour cela, il est nécessaire de réaliser un inventaire floristique sur les espèces et populations concernées, ainsi qu’un diagnostic de l’habitat.
Ce passage peut être l’occasion pour baliser les pieds qui seront déplacés. En effet, certaines plantes sont difficilement identifiables en dehors de leur floraison. Ainsi, à l’automne, saison souvent recommandée pour la translocation, le balisage doit permettre de retrouver facilement les espèces.
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Figure 5 : Piquetage de pieds de Lotier maritime – Lotus maritimus L. |
Figure 6 : Certaines plantes de petite taille peuvent être difficilement observables, d’où l’importance d’un piquetage – Clinopode des champs – Ziziphora acinos |
Etape 2 : Planification
Site d’accueil :
Le choix du site d’accueil est primordial pour la réussite des opérations. Plusieurs facteurs biotiques et abiotiques doivent être pris en compte afin de garantir aux plants déplacés des conditions de vie similaires.
Période d’intervention :
Il faut réaliser les opérations de translocation pendant la période de faible activité du système racinaire (automne jusqu’au début de l’hiver en général).
Protocole :
Les modalités techniques du chantier doivent être validées avant toute intervention. Pour cela, une visite sur site à minima entre l’entreprise travaux et l’écologue doit être effectuée. Cette visite est l’occasion pour échanger sur les contraintes techniques de l’entreprise (matériel à disposition, portance du sol, …) afin de s’assurer de la bonne réalisation des travaux paysagers.

Figure 7 : Préparation de la pelouse compensatoire en amont du déplacement des espèces
Etape 3 : Post-translocation
Un plan de gestion doit être rédigé afin de pérenniser l’installation de ces plantes sur le site d’accueil. Le coût de cette gestion doit également être pris en charge par le porteur du projet impactant.
Ce document doit déterminer le type d’entretien (fauche mécanique ou pâturage), sa fréquence (un ou plusieurs passages annuels) ou encore un zonage des secteurs à entretenir.
Enfin, une fois la translocation effectuée, le travail n’est pas terminé. Pour s’assurer de la réussite de l’opération, un suivi pluriannuel doit être mis en place sur la base d’indicateurs (nombre de pieds, surface recouverte par l’espèce…). Si les résultats des opérations ne sont pas jugés assez bons, des corrections doivent être apportées afin d’atteindre l’objectif fixé dans le cadre de mesures environnementales.

Figure 8 : Courbe de croissance attendue d’une population transloquée (d’après JULIEN 2022).
Attention, la translocation implique un temps d’adaptation pour la population déplacée. Ce qui implique une phase d’établissement avec un développement lent les premières années. Il convient donc d’attendre quelques années avant de tirer des conclusions de l’opération.

Figure 9 : Avénule des prés – Helictotrichon pratense, environ 200m² déplacés par mottes sur pelouse compensatoire préparée au préalable (Normandie).
Dervenn et la translocation végétale
Dervenn Conseils & Ingénierie accompagne depuis plusieurs années les porteurs de projet dans l’exécution d’opérations de translocation végétale. Ces mesures sont très souvent requises par les services instructeurs dans le but de préserver les populations d’espèces protégées ou patrimoniales qui seraient impactées par un projet.
Pour la phase opérationnelle, Dervenn Travaux & Aménagements dispose des compétences et des moyens nécessaires pour les opérations de transfert de la flore protégée ou patrimoniale.
[1] https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000865328/
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