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Comment reconnaitre une zone humide ?

Prairie humide

Prairie humide des sols acides et oligotrophes (© Dervenn)

Prairies humides, tourbières, boisements, … les milieux humides présentent une très forte diversité d’habitats qui façonnent nos paysages et apportent de nombreux services écosystémiques (lutte contre les crues, épuration de l’eau, loisirs, …). [1] Ces milieux recouvrent une faible superficie du territoire (environ 6%) mais jouent un rôle important dans la préservation de la biodiversité. Cependant, au cours du 20e siècle, 2/3 de ces milieux ont disparu en France, avec une vitesse jusqu’à 3 fois plus grande que les forêts : urbanisation, drainage, assèchement, remblaiement, en sont les principales causes [2].

Dans le cadre de projet d’aménagement (construction de lotissements, installation d’éoliennes et de parcs photovoltaïque, projet de création ou d’extension de ZAC, aménagements routiers, …) ou d’inventaire du patrimoine naturel, nous sommes régulièrement missionnés pour réaliser des délimitations et diagnostics de zones humides. Mais comment reconnait-on une zone humide ? De plus, quelle est la différence entre une zone humide et un milieu humide ?

Milieux humides ou zones humides ?

Ces deux formulations sont très souvent utilisées pour désigner des écosystèmes humides. La convention de Ramsar donne une définition globale des zones humides : ce sont « les milieux recouverts d’eau en permanence ou inondés de manière saisonnière ». La loi sur l’eau de 2006 instaure un sens réglementaire aux zones humides : elle les définit comme des « terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l’année ». Dans ce sens, seule une partie des milieux dits « humides » est concernée par les obligations de la LEMA sur les « zones humides ».

La définition de la convention de Ramsar est donc plus large et englobe une diversité de milieux plus importants que la définition réglementaire de zones humide de la LEMA. Dans le cadre de nos missions, nous intervenons sur les zones humides telles que définies par la loi de 2006.

Critères de reconnaissance d’une zone humide

La réglementation fixe les critères permettant de définir précisément ces milieux [3]. Ils reposent sur une étude pédologique du sol et une étude de la flore et des habitats.

Critère flore / habitat :

La végétation d’une zone humide, si elle existe est caractérisée :

  • soit par des espèces identifiées et quantifiées selon la méthode et la liste d’espèces figurant à l’annexe 2.1 de l’arrêté du 24 juin 2008 modifié. Cette dernière peut être complétée par une liste additionnelle d’espèces arrêtée par le préfet de région sur proposition du conseil scientifique régional du patrimoine naturel.
  • soit par des communautés d’espèces végétales, dénommées “habitats”, identifiées selon la méthode et la liste correspondantes figurant à l’annexe 2.2 de l’arrêté du 24 juin 2008 modifié.

 

Iris des marais (© Dervenn)

Critère pédologie :

Les sols des zones humides correspondent à certaines classes d’hydromorphie du groupe d’étude des problèmes de pédologie appliquée (GEPPA, 1981 ; modifié). Ils sont de 3 types :

  1. Les histosols, car ils connaissent un engorgement permanent en eau qui provoque l’accumulation de matières organiques peu ou pas décomposées ; ces sols correspondent aux classes d’hydromorphie H du GEPPA modifié.
  2. Les réductisols, car ils connaissent un engorgement permanent en eau à faible profondeur se marquant par des traits réductiques débutants à moins de 50 centimètres de profondeur dans le sol ; Ces sols correspondent aux classes VI c et d du GEPPA. Les traits réductiques se caractérisent par des taches de décoloration gris-bleu et correspondent à un processus de réduction du fer en période de saturation en eau.
  3. Aux autres sols caractérisés par :

 

  • des traits rédoxiques débutants à moins de 25 centimètres de profondeur dans le sol et se prolongeant ou s’intensifiant en profondeur. Ces sols correspondent aux classes V a, b, c et d du GEPPA ; Les traits rédoxiques correspondent à l’oxydation du fer et se matérialisent par des taches de couleur rouille ou des concrétions ferro-manganiques. Les horizons rédoxiques témoignent donc d’engorgements temporaires.
  • ou des traits rédoxiques débutant à moins de 50 centimètres de profondeur dans le sol, se prolongeant ou s’intensifiant en profondeur, et des traits réductiques apparaissants entre 80 et 120 centimètres de profondeur. Ces sols correspondent à la classe IV d du GEPPA.

 

 

Traces rédoxiques observées dans le sol (© Dervenn)

Sondage pédologique en milieux tourbeux

Cas particuliers : 

Il arrive sur certains secteurs que le critère pédologique ne soit pas exploitable notamment sur les fluviosols ou les podzosols (lessivage du fer et donc absence de traces d’hydromorphie). La délimitation des zones humides se base donc sur une expertise des conditions hydrogéomorphologiques, en particulier l’engorgement en eau dans les 50 premiers centimètres de sol. Cette étude peut être réalisée par exemple via la pose de piézomètres ou la compilation de données bibliographiques telles que les cartes pédologiques identifiant les fluviosols potentiels ; les données des crues et des données de terrain telles que les sondages pédologiques en hautes eaux et la présence d’une végétation humide spontanée.

Lien entre saison et délimitation de zones humides

La saisonnalité doit être prise en compte dans la délimitation des zones humides : la caractérisation pédologique des sols doit se faire lorsque les sols sont humides, idéalement en période de hautes eaux (de la mi-novembre à la fin avril selon les territoires) tandis que les prospections pour étudier la flore et les habitats devront plutôt être réalisées en été (juin à septembre). En effet, la réalisation de sondages pédologiques en plein été est compliquée voire quasiment impossible selon les territoires et les caractéristiques des sites (drainage, culture, …), tout comme la lecture des traces d’hydromorphie (sol complétement sec et poussiéreux). Au contraire, un inventaire flore / habitat en plein hiver ne permettra pas d’identifier toutes les plantes, certaines étant identifiables uniquement en période de floraison en été. La climatologie et la saisonnalité jouent donc un rôle important lors de la délimitation des zones humides !

 

[1] Services écosystémiques des zones humides – Ramsar

[2] https://www.mnhn.fr/fr/qu-est-ce-qu-une-zone-humide

[3] https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000019151510 et https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGIARTI000021330427/2009-11-25/

 

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