Mante grise
Pourquoi inventorier les insectes ?
Les insectes, classe d’animaux appartenant à l’embranchement des arthropodes, représentent environ 85 % de la biodiversité animale. L’entomofaune désigne la totalité de la population d’insectes présents dans un milieu. Mais un grand nombre d’entre eux sont en danger, menacés par trois principales raisons résultants des activités humaines :
- l’utilisation de pesticides
- la destruction et l’artificialisation des milieux naturels: urbanisation, intensification de l’agriculture, etc.
- le changement climatique.
Les insectes sont considérés comme piliers des écosystèmes et assurent une multitude de rôles écologiques ou services écosystémiques : constituants des réseaux trophiques, pollinisateurs, détritivores, etc. Il est donc essentiel de les protéger, et lutter contre le déclin de leurs populations.
En chiffres :
- 40 % des insectes sont en déclin au niveau mondial. Depuis 30 ans, la masse des insectes diminue sur Terre de 2,5 % chaque année, alors qu’au moins 75 % des cultures alimentaires en Europe dépendent des insectes pollinisateurs. (Source : OFB – La biodiversité en Danger)
- Sur les 301 espèces de papillons de jour vivants en France métropolitaine, 200 ont disparu d’au moins un département depuis le siècle dernier, soit 66 % des espèces (Source : ONB – Observatoire national de la biodiversité). Les insectes aquatiques comme les Odonates ne sont pas épargnés non plus par ce déclin : aujourd’hui 8% des espèces européennes de libellules et demoiselles sont menacées selon l’UICN (Boudot et al., 2017). Ce pourcentage pouvant paraître faible traduit mal les menaces qui pèsent sur ces espèces. Il est en effet souvent difficile d’évaluer à grande échelle les dynamiques de populations d’insectes comme les Odonates, mais les spécialistes s’accordent à dire que la tendance est globalement au déclin pour certaines espèces notamment au vu des nombreux suivis et études réalisés.)
Etant donnée l’importance de la biodiversité des insectes (au moins 40 000 espèces recensées en France métropolitaine), les inventaires se concentrent sur quelques ordres pour lesquels l’identification est possible sur le terrain :
- les coléoptères (scarabées) et en particulier les familles des cérambycidés (ou longicornes) et des lucanidae
- les lépidoptères (papillons) et en particulier la super-famille des papilionoidea (papillons de jour),
- les orthoptères (grillons, sauterelles et criquets)
- les mantoptères (mantes)
- les odonates (libellules et demoiselles).
Dans un cadre de préservation de la biodiversité, inventorier les insectes a pour objectif de :
- recenser les espèces d’insectes sur un site d’étude, leurs habitats préférentiels et ainsi connaitre leur répartition
- proposer la protection des habitats les plus riches et présentant des enjeux de conservation importants
- développer une meilleure connaissance des insectes dans leurs habitats
Les inventaires de l’entomofaune sont notamment réalisés dans le cadre d’études d’impacts et de suivi post projets d’aménagement.
Quelles sont les étapes d’un inventaire d’insectes ?
Un temps ensoleillé, chaud et calme (absence de pluie et de vent) est essentiel pour pouvoir observer et inventorier les insectes.
Le fauniste débute son inventaire par une recherche visuelle. Il parcourt le site d’études à la recherche d’individus en privilégiant les habitats favorables : lépidoptères (papillons), orthoptères (sauterelles, grillons et criquets), odonates (libellules et demoiselles), coléoptères, mantoptères, etc.
Les larves et exuvies (cuticules libérées lors de la mue de l’insecte) sont aussi observées puisqu’elles constituent des indicateurs de présence et une preuve d’autochtonie (utilisation d’un milieu donné pour le cycle de vie) de certaines espèces.
Emergence de Libellule (Mayenne – 2023)
Pour les coléoptères saproxylophages, les trous d’émergence des larves sont recherchés sur les troncs des vieux arbres feuillus (chênes en particulier).
Chêne abritant du Grand capricorne (Cerambyx cerdo) (Loire Atlantique – 2022)
Lorsqu’un insecte est repéré mais difficilement identifiable, il peut parfois être nécessaire de le capturer afin de l’étudier de plus près. Il est évidemment primordial de le manipuler avec grande précaution !
Manipulation d’un Criquet ensanglanté (Stethophyma grossum) (Mayenne – 2023)
Cette étape est suivie d’une observation des caractéristiques physiques de l’insecte dans l’objectif d’identifier l’espèce. L’insecte est rapidement relâché ensuite.
(Attention : certaines espèces d’insectes sont protégées par la loi, en particulier par l’Arrêté du 23 avril 2007 fixant les listes des insectes protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection. Aussi la manipulation des espèces concernées par cet arrêté doit faire l’objet d’une demande préalable auprès des services de l’Etat)
L’identification de l’insecte nécessite parfois de s’appuyer sur une clé de détermination. Cet outil consiste à sélectionner, parmi plusieurs choix portant sur les attributs du spécimen étudié, celui qui correspond le mieux aux observations. Il permet de déterminer la famille de l’insecte, son genre, son espèce, etc. (Néanmoins, il arrive que la détermination de certaines espèces, en particulier de coléoptères et de papillons, ne peut se faire sans l’examen approfondi des genitalia, c’est-à-dire les pièces génitales de certains insectes. Dans ce cas, et si l’identification à l’espèce peut permettre de relever des enjeux, des individus peuvent être collectés afin de les déterminer sous loupe binoculaire).
Le fauniste prend ensuite note de l’espèce observée et la géolocalise sur le site d’étude à l’aide d’une tablette numérique embarquée.
Quel matériel est utilisé lors d’un inventaire d’insectes ?
Les inventaires de l’entomofaune nécessitent d’avoir à disposition un matériel spécifique :
Fauniste en cours d’observation des insectes à l’aide de jumelles
- Des jumelles avec une mise au point possible à courte distance (inférieure à 3m) permettent l’observation et l’identification des insectes les plus gros, surtout les lépidoptères et odonates.
- Pour capturer les insectes volants – notamment les lépidoptères et les odonates – un filet à papillon est utilisé.
- Le filet fauchoir – comme son nom l’indique – est utilisé pour faucher la végétation et capturer les insectes qui s’y trouvent, en particulier les orthoptères.
- Le parapluie japonais, utilisé pour dénicher divers arthropodes qui vivent sur les branches des arbres et qui sont globalement cachés à la vue par la végétation. Cet outil s’avère efficace en particulier pour certains orthoptères inaudibles à l’oreille humaine (mais détectables à l’aide d’appareil sonore).
L’utilisation de ces filets nécessite habileté et rapidité, d’une part pour ne pas blesser l’insecte et d’autre part, pour ne pas le laisser s’échapper !
Naturaliste en cours de capture d’insecte
Comme lors de tout travail d’inventaire, il est essentiel d’avoir un appareil pour photographier le site d’études et les espèces qui y sont présentes.
N’hésitez pas à nous suivre sur nos réseaux sociaux pour connaître toutes nos actualités : Facebook, LinkedIn, Twitter et YouTube.
Sources :
https://www.ofb.gouv.fr/chiffres-cles
https://www.nationalgeographic.fr/environnement/2020/05/mais-ou-sont-passes-tous-les-insectes
